Pour mémoire est un espace dédié à Odile Duboc,
C’est une proposition conçue comme une exposition, un trajet sensible
à travers les documents et les archives d’une artiste chorégraphe.
C’est un site en mouvement, libre et empirique, à la recherche
d’une forme fidèle à la mémoire vivante d’Odile.
….Odile Duboc a préparé pour vingt amateurs une danse d’un esprit tout différent, à exécuter dans l’espace piétonnier du centre ville, place de la Caille. Deux danseuses que le vêtement à peine signale s’immobilisent et concentrent leur attention. L’une regarde légèrement de biais, fléchit sur une jambe, fait quelques pas. L’autre met sa main en visière au-dessus de ses yeux. On les remarque. La foule fait cercle. "Dire qu’il y a des gens qui font des choses sensationnelles" déclare une passante... "et on ne les regarde pas, tandis que là tout le monde s’arrête".
La remarque est pertinente. Cette manifestation fascine parce qu’elle montre un état minimal de la danse. Cela fait réfléchir et parler. N’est-il pas curieux que la foule aussitôt constitue un cercle et isole celui qui danse pour empêcher que tout événement fortuit ne vienne se mêler à cela qui est digne d’être vu ? La tradition des formes spectaculaires pèse lourd. Les danseurs se dispersent, rompent l’anneau et vont investir un autre lieu. Il est palpitant de suivre les mouvements des piétons dans la rue et d’observer comme ils voient ou ne voient pas les danseurs. De telles interventions ne sont pas peu de chose. John Cage nous a permis de porter attention au silence. Mark Tobey et Antoni Tapies attirent notre curiosité sur des tâches et les graffiti du temps sur les murs, et voici que la danse contemporaine nous entraîne à regarder avec des yeux neufs les mouvements de la rue. Pour les comprendre.
Extrait de l’article de Pierre Lartigue L’Humanité vendredi 9 juillet 1982
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